Le secrétaire général démissionnaire de l’Élysée Alexis Kohler a refusé de se présenter devant la commission d’enquête sénatoriale qui l’avait convoqué dans le cadre d’une audition relative à la question des eaux en bouteille, et plus spécifiquement au dossier qui touche à la pollution de la source Perrier et à l’implication du groupe propriétaire, Nestlé Waters. Les sénateurs se penchent actuellement sur les liens existant entre la présidence de la République et plusieurs dirigeants du groupe suisse Nestlé.
Une absence qualifiée de « dérobade » par le président de la commission d’enquête, le sénateur gardois Laurent Burgoa, premier observateur du dossier puisque la source et le site de production de Perrier sont situés sur la commune de Vergèze. Plutôt que d’entreprendre des poursuites judiciaires à l’encontre d’Alexis Kohler, les sénateurs ont choisi de rendre public le rapport de 74 pages relatant les rendez-vous et autres contacts téléphoniques entre Alexis Kohler, différents collaborateurs de l’Élysée et de Matignon et les dirigeants du groupe Nestlé entre juillet 2022 et décembre 2024. Des échanges qui se sont donc poursuivis bien après l’ouverture de la commission d’enquête en charge du suivi de ce dossier.
Dans ce souci de « vérité » et de « transparence », c’est peut-être la première pierre d’un scandale d’État qui a été jetée dans le jardin de l’Élysée. Rapporteur de la commission d’enquête, le sénateur socialiste de l’Oise Alexandre Ouizille confirme que la présidence de la République a été informée du « changement de filtration » par Nestlé. Une action illégale car remettant en question la qualité sanitaire de l’eau « par des contaminations d’origine bactérienne ou chimique ». À la fin de l’année 2024, un rapport de l’ARS Occitanie a confirmé la présence de virus malgré la microfiltration contestée par les normes en vigueur.
Alors que la production de l’usine Perrier est à l’arrêt, c’est désormais l’influence du groupe suisse au plus sommet de l’État qui est visée par la commission d’enquête. Le sénateur Ouizille évoque la présence de lobbyistes lors de nombreux rendez-vous afin d’obtenir notamment en février 2023 un feu vert de la part du gouvernement quant à la poursuite de la production sur le site de Vergèze via la fameuse microfiltration. La Chambre haute du Parlement, qui doit rendre son rapport le 19 mai prochain, s’est également émue de courriers de la part de Nestlé Waters remettant en cause la légitimité du champ d’action de sa commission d’enquête.
Ce mercredi, c’est le directeur général de Nestlé, Laurent Freixe, qui doit être entendu dans ce que le président Burgoa présente « comme une audition de la dernière chance », la lumière n’ayant pas totalement été faite selon les parlementaires sur ce dossier épineux.
Interviews : Laurent Burgoa (sénateur LR du Gard, président de la commission d’enquête Eaux en bouteille), Alexandre Ouizille (sénateur PS de l’Oise, rapporteur de la commission d’enquête Eaux en bouteille).