Grand Est : Franck Leroy démarre l’année en parlant mobilité et liberté |

Grand Est : Franck Leroy démarre l’année en parlant mobilité et liberté

Le président de la région Grand Est, Franck Leroy, a rencontré les journalistes de Moselle lors d’un déjeuner de 90 minutes, avec de nombreux sujets.

Routes nationales

Au sortir de la première réunion du comité de gestion des routes nationales à Metz, peu de temps avant d’autres réunions à Lunéville et St-Dizier, Franck Leroy est revenu sur les 524 km de voiries nationales non concédées (les autoroutes A30, A31, A33, A313, les RN 4, 44 et 431, ainsi que la RN 52 entre l’A30 et la frontière belge) qui sont désormais gérées par la région depuis le 1er janvier. « Avant, il y avait 30 millions d’euros par an d’investissement dans ces routes, cette année ce sera 103 millions d’euros. » Une expérimentation est faite pour 5 ans et pourrait inspirer d’autres régions. Le but : « tout reprendre et combiner les travaux avec un meilleur trafic ferroviaire, notamment en lien avec les frontières au nord. Ce sera au total plus d’un milliard d’euros d’investissement d’ici 2030, dans le transport, la sécurité ou encore le confort des aires de repos. « Notre objectif est d’être plus performant dans la gestion des routes que l’Etat n’a pu l’être depuis 30 ou 40 ans. »[A31]Taxe poids lourds

Pour financer une partie de ces nouvelles routes, une éco-redevance poids lourds sera mise en place en 2027-2028. « Les recettes seront intégralement répercutées dans la mobilité », annonce Franck Leroy. Cette ecotaxe « fonctionne déjà dans les pays aux alentours » et surtout, il permettra à la région de récupérer de l’argent des voisins, car 60 à 85% du trafic poids lourd sur ces axes provient de sociétés étrangères. « Si cette taxe avait existé depuis 10 ans, l’A31 ne sera pas dans cet état aujourd’hui ». Pour éviter une perte de compétitivité, la région s’engage à fournir un soutien logistique pour les transporteurs mais aussi une aide à l’investissement. Techniquement, pas de portiques mais une traçabilité grâce aux géolocalisations des routiers.

Trafic ferroviaire

Le transport passe aussi par le développement du rail. La ligne TER Metz-Luxembourg par exemple, fixe un cap pour 2032 avec 24 000 voyageurs en heure de pointe. Pour cela, les capacités des rames augmentent et les quais sont rallongés. Entre Thionville et Luxembourg, bientôt, un train passera toutes les 7 minutes, et en ajoutant les marchandises et les TGV, ce sera un trafic toutes les 3 minutes, « ce qui n’existe nulle part ailleurs, dans aucune région, c’est le tronçon le plus dense d’Europe. Mais le développement d’une région passe par sa performance dans la gestion des routes et du rail. » L’augmentation du trafic « oblige aussi à avoir une troisième voie sur l’A31 ».[Train cheminots]Identité

« Sur les sites de tourisme du Grand Est, on ne vend pas le Grand Est », s’amuse Franck Leroy, qui estime que les Lorrains, les Mosellans, ont gardé leurs identités. « Ce sont des sentiments millénaires, nous ne sommes pas là pour gommer les territoires » qui composent la nouvelle super région maintes fois critiquée. Sur le terrain, les citoyens ne se sont jamais sentis « grand-estois » et la volonté de la région reste d’être un fédérateur administratif plus que culturel.

Pouvoir d’achat

Ce n’est pas un levier sur lequel la région peut influer. Pour autant, le président du Grand Est liste une série d’actions en faveur du pouvoir d’achat des résidents du territoire : le bouclier tarifaire sur le prix des transports, l’ordinateur pour les jeunes, l’internat à 1 euro, le retour des trains sur certaines lignes. « Du service public accessible pour tous, c’est aussi ça le pouvoir d’achat ». Ou encore la connexion de tous les territoires, notamment les zones rurales qui composent plus de 90% du Grand Est.

Proximité

« Notre objectif est d’être aussi plus proches du terrain. Les citoyens ont besoin d’élus locaux qui comprennent le territoire ». La reprise en gestion des routes nationales part notamment de ce constat. « Par exemple, on peut déjà discuter avec le Département pour éviter un report trop massif des usagers sur les routes départementales, et trouver une combinaison d’actions communes ». Franck Leroy est aussi revenu sur la nomination de Nicolas Pernot, DGS de la Région, comme directeur de cabinet du nouveau premier ministre Bayrou. « J’ai été l’un des premiers au courant et je l’ai félicité. C’est une bonne nouvelle pour les régions et pour le Grand Est ». A l’image de Patrick Weiten, le président de la région constate une plus grande confiance accordée aux hommes et femmes des collectivités et donc « au terrain » avec ce choix politique. Et critique le non-cumul des mandats qui a fait « perdre cette proximité aux élus ».

Politique nationale

« La réindustrialisation de la France marche bien depuis 5 ans, notre territoire est de plus en plus attractif ». Le Grand Est est sur le podium des régions françaises et la 9e région d’Europe en terme d’attractivité. « Et sur 242 régions ce n’est pas rien ». La collectivité continuera à soutenir les projets, mais regrette l’instabilité politique gouvernementale et surtout le fait que « certains partis s’amusent du chaos. Je peux comprendre la désorientation des électeurs mais on ne peut pas mettre les idées partisanes au-dessus du national ». Avec l’exemple de l’instance régionale : « certains élus ne voulaient pas voter le budget, on devait le faire pour avoir la main sur nos routes et avancer les projets, on ne doit pas être irresponsables ».

Décarbonation

« La décarbonation doit se faire. Mais l’Europe doit aussi être compréhensive et indulgente quand on parle des producteurs de voitures étrangères par exemple ». La région veut ainsi travailler avec les plateformes de mobilité pour conserver sur le territoire les bonnes initiatives. Pour le secteur automobile, cela passera aussi par une aide à la formation ou à la reconversion. « On sait que les emplois dans ce secteur vont baisser, comment transformer ces emplois dans des secteurs qui vont recruter comme l’aéronautique ou la métallurgie ? » Le Grand Est qui veut aussi accompagner les entreprises et les particuliers pour la loi sur les ZFE. « Si le monde politique avait été connecté au local, cette loi aurait été plus souple et plus acceptable. On ne peut pas rendre coupable les gens qui ont un véhicule diesel alors qu’on les incitait à en avoir il y a 15 ans ». Parmi les pistes : soutenir l’innovation ou équiper les collectivités pour donner l’exemple.

Charlie Hebdo

La réunion s’est tenue pile pour les 10 ans des attentats de Charlie Hebdo, devant un parterre de journalistes mosellans qui participeront pour certains à une table ronde cette semaine avec des dessinateurs de presse. Franck Leroy est revenu rapidement sur ce qu’il faisait au moment des attentats : « j’étais en voiture vers Châlons, je partais au tribunal. On avait appris que les terroristes allaient vers Reims, on a donc suivi cela dans l’inquiétude générale ». Le Grand Est a publié une édition spéciale réalisée par des lycéens du territoire, diffusé à 22 000 exemplaires, avec l’aide de la rédaction du journal. « Une façon de leur apprendre la liberté d’expression, à les encourager à blasphémer, à critiquer et à avoir de l’autodérision », commente-t-il. Un projet qui semble avoir intéressé les jeunes mais pas seulement, Charlie Hebdo pourrait vouloir étendre le dispositif à d’autres régions.